Célébrer la fête des récoltes est-il un rite païen ?

Avec la mise en avant de la réflexion sur l’écologie, de nombreuses paroisses célèbrent de plus en plus la fête des récoltes. Est-ce le retour de la divinisation de la Nature dénoncée par les prophètes de l’Ancien Testament contre les rites païens cananéens ? La question est plus complexe qu’il n’y paraît.

Une fête aussi vieille que l’humanité

 

Tous les anthropologues et historiens des religions diront que les fêtes des récoltes font partie, depuis l’aube de l’humanité et dans toutes les religions du monde, des rituels apotropaïques (pour éloigner le mal) et propitiatoires (pour se concilier la ou les divinités) pour favoriser leur prospérité.

 

C’est un trait typique des sociétés de subsistance agricoles antiques : fête grecque de la Kronia, fêtes romaines des Sementivae, Robigalia, Lupercales et Saturnales, Chavouot dans la tradition juive, Rogations de l’Église catholique… Ces sociétés redoutaient en effet les aléas climatiques, attaques de ravageurs de plantes, etc. Ces fêtes ouvrent ou terminent une période de travail (comme les fêtes de la Saint-Jean ou les Rogations) et font une large place aux symbolismes du feu (feux de joie, jeux avec des torches, processions aux chandelles ou aux flambeaux).

 

Dans bien des Églises locales, et encore très fréquemment en Alsace- Moselle, un « culte des récoltes » est organisé chaque année à l’automne, le premier dimanche d’octobre (date de l’Erntedankfest, fête des récoltes, dans les pays germaniques).

 

 

Faut-il nécessairement un ancrage biblique ?

 

Certains (surtout dans le protestantisme) ont absolument besoin d’un ancrage biblique pour justifier une fête. Alors on ira fouiller dans l’Ancien Testament pour en sortir la fête des Prémices (Exode 23,17 et 34,26) que le judaïsme a transformé en fête des Semaines (Chavouot). C’est le début de la moisson du blé, sept semaines après la Pâque. En grec, pentakosté héméra, (cinquante jours), soit la fête de Pentecôte que reprendra le christianisme, avec un nouveau symbolisme.

 

Car les rabbins, grands amateurs de mysticisme, vont faire de Chavouot, la fête de la révélation de la Loi sur le mont Sinaï.

 

Faut-il faire de l’archéologie biblique pour justifier chaque fête ? Dans ce cas-là, la fête de Noël, le 25 décembre, a du souci à se faire. D’autant plus que le calendrier agricole nord-occidental n’a rien à voir avec l’agriculture du Moyen-Orient…

 

Au XXIe siècle, une nouvelle signification

 

Alors aujourd’hui, dans notre société moderne et technicienne, remettre à l’honneur la fête des récoltes, ce n’est pas retomber dans le paganisme et l’idolâtrie. C’est au contraire chercher à réconcilier l’homme avec Dieu en lui montrant que sa vie ne dépend que de Dieu. Il s’agit de retrouver, dans les bien-faits que nous obtenons de la nature, l’activité créatrice et bien vivante de Dieu.

 

On a ainsi vu apparaître, depuis 2018, des célébrations œcuméniques de « Temps pour la Création », du 1er septembre au 4 octobre. Le pasteur Jerry Pillay, secrétaire général du Conseil œcuménique des Églises, présente ainsi l’édition 2023 soutenue par la réflexion sur le verset du prophète Amos : « Mais que le droit jaillisse comme les eaux et la justice comme un torrent intarissable ! » (Amos 5,24). Le pasteur Pillay ajoute : « Nous vivons une époque turbulente et troublée. Nous continuons de lutter pour la paix dans le monde, la réconciliation et l’unité de toute la Création. La guerre, la violence, les enjeux climatiques et les systèmes injustes nous entourent. Tout cela continue de déshumaniser et d’oppresser des personnes dans le monde entier. Les chrétiennes et chrétiens sont appelé·e·s à s’unir à Dieu dans le fleuve puissant menant à la justice et à la paix dans le monde. »

 

Présentation et guide sur https://www.egliseverte.org 

 

 

 

 

 

 

#Actualité #écologie et justice climatique

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