Face à la mort

Certaines paroles bibliques peuvent choquer tant elles entrent en contradiction avec ce que l'on vit, ce que l'on ressent, avec la réalité du monde. Mais les ondes de ce choc agissent, à notre insu...

C’est un écho lointain, qui remonte à près de quarante ans, bien avant que j’aie trouvé ma foi et mon Église. J’avais une éducation religieuse de base, mais elle ne jouait aucun rôle dans ma vie. Un jour de juin, ma mère m’apprit que son père était mort. Je reçus la nouvelle sans grande émotion, elle me paraissait dans l’ordre des choses, l’issue normale de la maladie.

 

La famille se rendit dans la petite ville de Gironde où se trouvait la concession pour l’enterrement. Comme mon grand-père était réputé athée, ayant rejeté le protestantisme rigoureux de ses propres parents, il n’y eut pas de culte d’action de grâce au temple, mais quelqu’un avait demandé à un pasteur de nous accompagner au cimetière. Je crois que c’était la première fois que j’assistais à des obsèques.

 

Nous étions là, debout au bord de la tombe ouverte, et le pasteur a commencé à lire : « L’Éternel est mon berger, je ne manquerai de rien. Il me fait reposer dans de verts pâturages, il me guide vers des eaux paisibles. Il restaure ma vie. Il me conduit sur les sentiers de la justice, à cause de son nom. Même si je marche dans la vallée de l’ombre de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi. »

 

Ces paroles ont déclenché en moi des sanglots incontrôlables et complètement inattendus. Les premiers mots si apaisants, décrivant un cadre idyllique, venaient se fracasser dans ce trou où l’on était en train de mettre mon grand-père. La beauté inquiétante de l’expression « la vallée de l’ombre de la mort » me déchirait le cœur, entre fascination et révulsion.

 

J’étais saisie par une force venue je ne sais d’où. La mort de mon grand-père, seule, ne m’avait pas bouleversée, mais le texte du Psaume avait ouvert un abîme à la mesure de la tombe. Dans mon désespoir, je voyais le contraste entre le message de consolation et de confiance et la réalité de la mort. Et aucunement la réalité du message. Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. Tout au plus, je voyais que j’étais démunie devant la mort, cela je le savais, mais je ne l’avais jamais éprouvé au plus profond de moi.

 

En même temps, si le Psaume me remuait de cette façon, c’est qu’il avait quelque chose à me dire. Il me présentait l’image d’amour et de douceur du bon berger, mais je n’arrivais pas à l’éprouver. Avant de pouvoir le faire, il fallait que j’ose la confiance, que je reconnaisse l’appel et que j’y réponde. Est-ce que je me suis mise en route ce jour-là ? Non, si on entend par là une décision consciente de suivre le Christ. J’en étais même à des années-lumière. Oui, parce que j’ai éprouvé violemment que si je refusais de voir qu’il y avait un choix, je restais du côté de la tombe, et parce que Dieu m’a forcée à le voir. Je dirais alors : Il m’a mise en route à mon insu.

 

Mosaïque de Ravennes
©famille Paul

 

 

 

 

 

 

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