Le temple de Lougres, lors de la promulgation de la Loi de séparation des Églises et de l’État, est passé entre les gouttes des procédures administratives ; c’est du moins ce que colporte la rumeur villageoise. La commune s’en est dans tous les cas retrouvée propriétaire. Ces dernières années, l’état de la toiture a favorisé des infiltrations et l’apparition du capricorne dans la charpente. Le plafond mouluré en plâtre s’est gorgé d’eau et s’est, en conséquence, partiellement effondré ; les nombreux carreaux cassés des fenêtres ajoutaient encore à l’aspect délabré de l’édifice. La population s’est alarmée de cette situation, la jugeant indigne de ce bâtiment de caractère. Le clocher en tuiles vernissées émerge des toits des maisons attenantes et donne tout son cachet au village. Le temple de Lougres est l’un des derniers sanctuaires montbéliardais classiques à avoir été édifiés.
Il faut avoir la curiosité de pousser la porte de ce lieu surprenant à plus d’un titre : la chaire, accrochée à un mur latéral, à une hauteur inaccoutumée, est couronnée par un abat-voix fixé à la corniche d’un plafond habilement reconstitué ; une belle table de communion, en pierre, attire les regards par ses harmonieuses proportions. Les restaurateurs ont maintenu les planchers et les bancs rustiques, en réparant cependant les socles abîmés.
Le maire, Patrick Froehli, appuyé par son conseil, a lancé les travaux s’élevant à quelques 150 000 euros et subventionnés à presque 50 %. Le choix a été fait de travailler notamment avec une association d’insertion, Ideis Mission Locale ; le chantier n’étant pas tenu par des délais trop serrés, ce choix a fait merveille. Le résultat est parfaitement concluant et les comptes sont équilibrés.
Le temple d’Allenjoie, quant à lui, profondément réaménagé en 1860, soit moins de 40 après la construction du temple de Lougres nous fait entrer dans un tout autre climat imprégné de style néo-gothique. Cette petite église de village donne une impression de grandeur par un équilibre des volumes et une mise en scène architecturale pensée dans les moindres détails. Le clocher, couronné de quatre pinacles, a été l’objet de soins particuliers, avec sa flèche élancée et son décor de fleurons et de crochets.
Le double escalier monumental donnant accès au portail a été entièrement démonté, car d’inquiétants renflements dans la maçonnerie faisaient craindre un effondrement ; la flèche, menaçant ruine, nécessite une dépose complète. Le maire, Jean Fried, assisté de son conseil et de madame Monique Ferciot, tous conscients de la beauté de leur temple, construit sur un tertre surplombant le village, s’engagent avec force et conviction pour cette restauration dont le montant avoisine les 800 000 euros. L’ensemble du bâtiment doit être repris. Le temple renferme une chaire monumentale surmontée d’un abat-voix en forme de pagode et un harmonium qui a bénéficié d’une restauration soignée et qui a fait l’objet d’enregistrements ; notons aussi les baies ogivales disposant de structures en fonte moulée imitant les remplages gothiques.
Les travaux entrepris par les communes sont exemptés de la TVA et bénéficient de nombreuses subventions. Il n’empêche ! rien ne remplace l’enthousiasme de personnalités qui portent ces projets ambitieux ; des travaux si nécessaires au maintien du savoir-faire des artisans et à la beauté de nos sites.
