Les enjeux des relations institutionnelles entre chrétiens et juifs sont issus d’une histoire faite de détresses et porteuse de promesses encore inaccomplies 1.
L’enjeu théologique
L’enjeu théologique a été perçu de façon contrastée selon les temps, mais depuis la Réforme, la question est entrée délibérément dans le champ de la réflexion des Églises. Luther, Calvin, Bucer 2 ont amené à ne plus jamais sous-estimer le sujet : l’enjeu n’est pas seulement de reconnaître dans le judaïsme un « héritage » ou une « racine » qui enrichit notre lecture de la Bible, mais le partenaire contemporain porteur d’une interpellation sur la compréhension même de ce qu’est l’Église, interrogeant les présupposés de notre rapport à la Bible, de nos catéchèses, de nos prédications et de nos liturgies 3.

(© Aude Millet Lopez, service communication)
Ce que souligne la « Déclaration fraternelle du protestantisme au judaïsme » du 4 décembre 2017 4 invite ainsi les membres d’Église à participer aux travaux des associations et des institutions concernées : « D’importants principes théologiques ont pu être affirmés : la reconnaissance de l’irrévocable élection du peuple juif, la reconnaissance du lien indissoluble avec Israël, comme élément essentiel de la définition même de l’Église, le rejet de toute théologie de substitution… l’abandon de toute mission visant la conversion des juifs ».
Enjeux communautaire, social, politique
L’enjeu communautaire est celui qui place chaque Église et chaque synagogue devant l’invitation pressante à nouer des liens, à dialoguer et à promouvoir des projets qui fassent sens.
L’enjeu social est notamment lié à la lutte permanente contre l’antisémitisme et toutes les discriminations 5.
L’enjeu politique est celui de notre engagement de vigilance commune dans la République et du discernement quant aux questions liées au Proche-Orient, à l’État d’Israël et aux combats pour la justice.
Ce travail de mémoire amène juifs et chrétiens à se considérer comme bénéficiaires d’une même promesse qui esquisse l’horizon d’une même espérance.
Notes
1 cf. « Les 10 points de Seelisberg », 1947, CICJ, Genève. Déclaration sur les relations de l’Église avec les religions non chrétiennes « Nostra Aetate », Rome, 28 octobre 1965. « Les 12 points de Berlin », juillet 2009, ICCJ. « Déclaration pour le Jubilé de fraternité à venir, une nouvelle vision juive des relations judéo-chrétiennes », 23 novembre 2015.
2 cf. M. Lienhard : Martin Luther, Labor et Fides, 2016, p 477 ss ; F. Clavairoly : Calvin et les juifs, in Sens, 2006 ; M. Greschat : Bucer, PUF, 1990, p 170 ss ; M. Yardeni : Juifs et huguenots, H. Champion, 2008. Déclaration de l’Uepal : « Luther, les juifs et nous », Vademecum, 2017.
3 cf. la décisive contribution des Églises issues de la Réforme : « Église et Israël », in Foi et Vie, 2002. Voir aussi Actes du colloque « Foi protestante et Judaïsme », FPF, octobre 2010.
4 « Déclaration fraternelle : cette mémoire qui engage », FPF, Olivétan, 2017.
5 « L’antisémitisme est un péché contre le Saint-Esprit, car il signifie le rejet de la grâce divine » : K. Barth, 1938, Wipkingen.
