Le déficit du budget de l’État devrait être de l’ordre de 140 Md€ en 2025, soit 4,3 % de la production de richesse nationale (PIB). Pour rendre ce chiffre un peu moins abstrait, on peut rappeler que cela représente 45 % des recettes nettes du budget. On peut aussi le comparer au total des crédits annuels pour la défense (60 Md€) ou pour l’enseignement scolaire (89 Md€). C’est beaucoup.
« Et alors ? », entend-on parfois. Le budget de l’État n’a-t-il pas été en déficit tous les ans depuis 1975 ? Cela a-t-il empêché l’économie réelle de progresser, de créer des emplois, de trouver des prêteurs pour financer le déficit, en évitant les désagréments, bien réels, d’une augmentation des impôts ou d’une réduction des dépenses ? C’est vrai. On ne gère pas le budget d’un grand État moderne comme celui d’un foyer familial. Un État, notamment le nôtre, a beaucoup de leviers à sa disposition pour réguler l’économie, et le budget est l’un d’entre eux, qu’il est légitime d’utiliser.
Des limites du déficit public
Mais la capacité de notre pays à supporter un déficit élevé n’est pas sans limite. En premier lieu, il faut se souvenir que l’État est garant vis-à-vis de l’Union européenne, non seulement de son propre déficit, mais aussi de celui des collectivités territoriales, des établissements publics nationaux, de la sécurité sociale… La dynamique de ces dépenses complémentaires est forte et l’État a du mal à la maîtriser (que l’on pense aux besoins croissants liés au vieillissement de la population…).
En second lieu, les déficits sont cumulés sous la forme d’une dette publique (environ 3500 Md€) qui entraîne des charges d’intérêt annuelles. Ces charges seront de 55 Md€ en 2025. Elles ont doublé depuis 2020. Cela est dû à l’augmentation de la dette ellemême, mais aussi à l’augmentation des taux d’intérêts. Or, on sait que si le taux d’intérêt est durablement supérieur au taux de croissance de l’économie, un effet « boule de neige » s’enclenche, avec une augmentation inéluctable du déficit public, toutes choses égales par ailleurs. Il se trouve qu’après une longue période de baisse du taux d’intérêt payé sur la dette publique, celui-ci augmente désormais, pour des raisons liées au contexte économique mondial, mais aussi car les prêteurs sont un peu moins confiants qu’avant dans la capacité de notre pays à rembourser la totalité de sa dette.
L’enjeu de la confiance
Il est donc essentiel de maintenir la confiance pour pouvoir continuer à emprunter dans de bonnes conditions. Or, et c’est le troisième point, l’État en France tient rarement ses engagements en matière de finances publiques. Soit qu’il se trompe sur l’estimation des recettes, soit qu’il découvre des besoins nouveaux de dépense en cours d’année, il a du mal à tenir ses prévisions. La dégradation récente de la note de la France par plusieurs agences de notation montre que nous sommes désormais sous observation.
Dans ce contexte, le budget de l’État pour 2026 revêt une particulière importance. On ne peut que souhaiter que l’intérêt national, qui exige aujourd’hui un plan crédible de stabilisation de la dette publique, l’emporte sur les positionnements partisans et que soit trouvé, sans surenchères exagérées, le bon équilibre entre économies de dépenses et augmentations des prélèvements.

© Art Anderson/Wikimedia Commons
