
© Voyou, mars 2025
Voyou compte parmi les jeunes artistes de la chanson qui se refusent à rompre les amarres tout en faisant entendre une voix singulière – en l’occurrence, une personnalité pop lettrée aux influences trop nombreuses pour être aisément repérables sous la clarté de l’interprétation. Son troisième album depuis 2019 dévoile une influence fondatrice : il a découvert très jeune Henri Salvador avec une version magnifique du « Scaphandrier » de Léo Ferré, enregistrée à l’aube des années 1950 – une excellente porte d’entrée pour une œuvre en grande partie sous-estimée. Une bonne moitié des chansons de cet album sont des raretés, à commencer par le superbe « Pauvre Jésus-Christ », inquiet de la violence du show business de 1972, ici en duo avec Flore Benguigui. On retrouve « Syracuse » ou « Jardin d’hiver », mais la plupart des auditeurs découvriront « Un sacré menteur », « Et des mandolines » ou « Les amours qu’on délaisse ». Avec parfois un quasi-mimétisme dans le timbre et dans la fausse désinvolture, Voyou plonge au plus profond de l’identité presque secrète d’Henri Salvador, crooner et amoureux de la poésie contrarié par sa gloire de rigolo. Avec « Dans mon île » ou « Amour perdu », on saisit l’intemporalité d’un immense créateur.
