Deux hommes font-ils route ensemble sans s’être d’abord rencontrés ? (Amos 3.3)

Ce verset du livre d’Amos est très souvent employé pour insister sur le besoin de s’entendre avant de prendre la route ensemble. D’autant plus lorsqu’on remarque que le verbe hébreu ya`ad est traduit, dans d’autres versions, par concerté, convenu ou accordé. En effet, il est de bon ton qu’un groupe établisse son itinéraire avant de partir en randonnée… Mais est-ce vraiment là le sens du verset ?

Prenons le temps de faire connaissance avec Amos, ce bouvier cultivateur de sycomores, qui n’était pas prophète de métier. Essayons de comprendre son message, et plus précisément ce qu’il entendait par ya`ad. Nous savons qu’Amos n’était pas très populaire. Prophète de malheur dans une période de faste et de sérénité, il fournissait à son époque une critique socio-religieuse forte. C’est ainsi qu’il annonce des malheurs pour tous les voisins d’Israël, Juda y compris, avant d’annoncer un oracle contre Israël. Amos est typiquement de ces prophètes qui dérangent, parce qu’ils rappellent à Israël les devoirs qui découlent de sa bénédiction. Israël ne peut se complaire d’être le peuple élu. À cause de cette bénédiction il faut qu’il se soucie du respect du droit et de la justice, pour rester en phase avec l’Alliance. « Parmi toutes les familles de la terre, c’est à vous seuls que je me suis intéressé. C’est pourquoi je vous demanderai compte de tous les crimes que vous avez commis » (Am 3.2). Le malheur est annoncé à Israël parce que la bénédiction n’a pas été honorée, parce qu’elle n’a pas été respectée.

 

Le verset qui nous intéresse correspond donc à un rappel de cette Alliance entre Dieu et son peuple. Amos emploie une image qui ne peut être qu’immédiatement comprise par les hommes, pour encourager Israël à respecter ses engagements, à tenir ses promesses et ainsi à revenir à l’Éternel. En somme, c’est un prophète comme les autres : il demande au peuple de vivre dans le droit et la justice, conformément à l’Alliance : relisez par exemple Am 5.23-24.

 

John Wesley a fait un joli parallèle dans l’une de ses prédications entre ce verset d’Amos 3.3 et la rencontre de Jéhu et Yonadab (II Rois 10.15) :

« Un peu plus loin, Jéhu vit Yonadab, fils de Rékab, qui venait vers lui. Jéhu le salua et lui dit : “Es-tu loyal envers moi, comme je le suis envers toi ?

— Oui ! répondit Yonadab.

— Eh bien, serrons-nous la main ! déclara Jéhu.”

Ils se serrèrent la main, puis Jéhu le fit monter sur son char. »

Cette rencontre entre Jéhu et Yonadab, avant de prendre la route ensemble, leur permet de vérifier, la disposition de cœur de l’autre. Rien de plus ! Pas besoin d’un long discours, une simple garantie de loyauté réciproque. Par contre, cela aura de véritables conséquences sur la suite des aventures : cela introduit un investissement inconditionnel dans le service de l’autre. Ce sont toutes ces missions qu’Amos réclame au peuple d’Israël.

Ainsi, Amos nous encourage à être des Jéhu et des Yonadab, à nous rencontrer, oui, mais aussi plus encore à nous serrer la main au-devant de nos projets communs. Qu’est-ce que cela veut dire ? Une ouverture d’esprit par rapport à l’autre ou, par exemple, à sa pratique de la foi. Une démarche d’amour, de respect mutuel. Mais aussi un engagement commun dans la prière et dans les œuvres bonnes. Ce sont toutes ces missions qu’Amos réclame au peuple d’Israël.

Pour conclure, reprenons ici quelques lignes du message de John Wesley :

« Donne-moi la main, c’est à dire aime-moi, mais non pas seulement comme tu aimes tous les hommes, non en paroles seulement, mais en effet et en vérité. Joins-toi à moi, autant que tu le peux, en pleine conscience, tout en retenant tes vues particulières et ton culte, et donnons-nous la main pour l’œuvre de Dieu. »

#Auteurs Alsace-Moselle #Grain de sable #Spiritualité #Théologie

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