Que faire aujourd’hui du Credo de Nicée ?

Après 1700 ans de bons et loyaux services, faut-il le ranger au rayon des antiquités poussiéreuses dont on ne comprend plus bien l’usage, mais dont la vénérable ancienneté a quelque chose de rassurant et invite au respect ?

Le vocabulaire, la théologie sont certes datés, au sens où ils portent la marque de leur époque et des débats qui l’agitaient. Ils ne sont probablement plus compris en toute rigueur par les nombreux fidèles qui le récitent encore lors des célébrations dominicales.

 

Il y a peu, à l’occasion d’un repas œcuménique, un évêque a proposé une comparaison éclairante : le Credo de Nicée-Constantinople, c’est un peu comme la Marseillaise pour nous autres Français. Il y a des termes que l’on ne comprend pas, des passages qui heurtent notre sensibilité de modernes et que l’on préférerait supprimer, et pourtant, dès qu’on l’entend ou qu’on l’entonne, on s’y reconnaît infailliblement, on se reconnaît français. Il en irait du même du Credo de Nicée. Qu’importe s’il n’est pas saisi dans toutes ses subtilités, il opère comme un signe de reconnaissance, qui nous fait nous sentir chrétiens, avec d’autres chrétiens, fussent-ils d’autres confessions.

 

Un texte symbolique

 

On parle à cet égard de texte symbolique. Le Symbole, s’il n’a pas la même autorité que les Écritures, dit l’essentiel de la foi chrétienne. Confesser sa foi avec ces mots hérités, c’est s’inscrire dans une longue histoire, se reconnaître des ancêtres dans la foi dont on est redevables, ainsi que des frères et des sœurs au présent, toutes Églises confondues.

 

Cependant, lors du même repas, un prêtre orthodoxe a réagi avec vigueur. Cette comparaison avec un hymne laïque l’avait visiblement surpris et un peu heurté. Le Credo de Nicée méritait d’être traité avec un peu plus de déférence. L’œcuménisme, c’est bien connu, est un chemin semé d’embûches, et gare à ne pas avancer avec trop de désinvolture… Heureusement, le désaccord et l’incompréhension pouvaient se dire en toute liberté, dans un climat convivial où la bonne humeur l’emportait.

 

Quelle signification pour nous, aujourd’hui ?

 

La discussion a permis de mettre au jour les différentes façons dont le Credo de Nicée était reçu et perçu. Pour le prêtre orthodoxe, soutenu en ce sens par les représentants de quelques Églises évangéliques, il en allait de la vraie foi et de la vraie doctrine. La catéchèse qu’il prodiguait à ses jeunes fidèles consistait d’ailleurs en une explicitation du symbole de Nicée-Constantinople. De toute évidence, chaque confession ne lui accordait pas tout à fait la même place ni la même importance.

 

Que faire aujourd’hui du Credo de Nicée ? Certainement pas l’enterrer comme un pieux trésor. Peut-être pas seulement se contenter de le réciter de temps à autre, même si ce symbole nous rassemble comme héritiers des grands conciles œcuméniques des premiers siècles. Mais pourquoi pas oser s’y aventurer, en explorer la signification, entrer en dialogue avec lui ? Non pour s’arrêter à ses formulations comme définitives, mais pour s’en nourrir, chercher ce qui en elles est encore susceptible de nous interpeller. Pour développer notre intelligence de la foi, non pas sans, ni contre, mais avec le Credo de Nicée.

 

 

 

Cette année, la semaine de prière pour l’Unité des chrétiens est marquée par les 1700 ans du 1er concile œcuménique, qui a eu lieu à Nicée en 325. Le Conseil d’Eglises chrétiennes en France (CÉCEF) a choisi Lyon pour l’évènement de célébration, le 18 janvier au Grand temple qui sera télévisée et retransmise le dimanche 19 janvier matin.

 

 

 

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