L’ONU voit le jour le 24 octobre 1945, à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. Une naissance qui fait suite à la ratification de la Charte des Nations unies par la Chine, les États-Unis, la France, le Royaume-Uni, l’URSS et la majorité des cinquante pays signataires. L’expression « Nations unies », suggérée par le président américain Franklin Delano Roosevelt, date de la Déclaration des Nations unies du 1er janvier 1942. Un texte par lequel les représentants de 26 pays s’engagent à poursuivre ensemble la guerre contre les puissances de l’Axe, c’est-à-dire l’Allemagne, l’Italie et le Japon. Comme la Société des Nations (SDN) à la fin de la Première Guerre mondiale, l’ONU a pour objectif le maintien de la paix et de la sécurité internationale. « Des nations posent ensemble un acte qui parle d’un universel qui leur échappe », commente Jean-Christophe Muller, pasteur retraité de l’Église protestante unie de France, ancien adjoint au maire d’Alès et ancien conseiller régional du Languedoc-Roussillon. « C’est une idée qui sort du chaos, comme dans la Genèse où Dieu dit : “Qu’il y ait de la lumière”. »
Une idée chère aux Églises protestantes américaines
La création de l’ONU a largement été soutenue par le protestantisme américain. François David, professeur en relations internationales à l’Université Lyon 3, l’explique dans son article « Les protestants américains, l’Europe, et la sortie de l’isolationnisme : le Conseil fédéral des Églises et le Comité pour une paix juste et durable (1940-1945) »(1) : « Dès 1940, les Églises américaines ont appelé de leurs voeux la création de la future ONU ainsi que de la nouvelle Organisation mondiale du commerce. […] L’élite protestante a exhorté l’opinion américaine à ne pas s’effrayer des grandes organisations de l’après-guerre. » L’auteur précise qu’« elles ont combattu la vision d’un après-guerre dominé par l’impérialisme anglo-saxon et récusé une exploitation égoïste et nationaliste de la victoire ».
Un fonctionnement démocratique d’inspiration réformée ?
L’influence du protestantisme américain serait même visible dans le fonctionnement de l’organisation internationale. C’est en tout cas ce qu’affirmait le professeur de géopolitique François Thual dans les colonnes de Réforme en janvier 2007 : « L’archétype d’un monde organisé autour d’une assemblée des peuples semble bien être la projection planétaire du fonctionnement d’une Église issue du modèle calviniste ou, pour être plus précis, des formes néocalvinistes qu’a prises le protestantisme en franchissant l’Atlantique. »
Cette organisation rappelle en effet le régime presbytéro-synodal des Églises réformées qui repose sur des assemblées et des conseils élus.
Les élites protestantes américaines de 1945 seraient sans doute atterrées par les critiques acerbes de l’ONU de la part de l’administration Trump. Le regain des impérialismes et les guerres actuelles, en Ukraine ou à Gaza, continuent de décevoir leurs espoirs de paix initiaux. Mais, au moment où les Nations unies fêtent leurs 80 ans, l’espérance reste de mise : « L’ONU est le lieu où les gens se rencontrent, le lieu de nombreuses collaborations mondiales », rappelle Jean-Christophe Muller. « Pour moi, il n’y a pas de faillite morale des Nations unies. »

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(1) Histoire, économie & société, vol. 2009 (04), p. 85-95.
