Pour/contre : Le revenu universel

Denis et Françoise Costil sont tous deyux engagés dans des associations de solidarité. Pourtant leurs positions divergent sur la question d'un possible revenu universel de subsistance.

Pour

 

La pauvreté, c’est d’abord la pauvreté matérielle. Si elle a reculé dans le monde, elle stagne autour de 14 % en France, où on trouve des travailleurs pauvres. Or, tout laisse à penser que la concurrence de la robotisation et de l’intelligence artificielle dans la production et les services va diminuer le nombre de postes de travail, d’abord ceux de faible ou moyenne qualification…

 

La pauvreté, c’est aussi une vie sans espoir et sans dignité. Et demain, quelle dignité si la concurrence conduit à créer de plus en plus de travailleurs pauvres dans une société où les écarts de revenus ne feront qu’augmenter ? Comment ne pas laisser au bord de la route beaucoup d’entre nous ?

 

Or, les ruptures en cours sont sans commune mesure avec les ruptures du passé parce qu’elles touchent à tous les aspects de la vie, dans une période où la finitude spatiale, les déséquilibres biologiques et climatiques limitent un développement tous azimuts.

 

Une réponse possible ? Le Revenu universel de subsistance ; « distribution à tous, par l’État, d’un revenu suffisant pour vivre », avec beaucoup de variantes sur tous, suffisant pour vivre, sur le montant égal ou non pour tous !

 

Décrire les avantages ou inconvénients de ce dispositif est délicat : on trouve tout et autre chose dans la littérature ! Et des expérimentations (Finlande, Italie…) n’en sont qu’à leur début. Continuons ! Et, rêvons un peu : c’est l’utilité sociale de l’activité qui assure la reconnaissance sociale et non plus l’emploi ; les écarts de revenus diminuent…

 

Pour terminer, mes espérances inusables : « Toute personne […] est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux, culturels indispensables à sa dignité… » (Déclaration universelle des droits de l’homme, art. 22), mais aussi : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Marc 12.31) et « Fais aux autres ce que tu voudrais qu’on te fasse. » (Luc 6.31)

 

Denis Costil

 

engagé au Foyer protestant de la Duchère (Lyon)

 

 

 

Contre

 

Lors des campagnes pour les dernières présidentielles, j’ai partagé combien j’étais hostile à la proposition de Benoit Hamon d’instituer le revenu universel.

 

Bien sûr, je n’ai rien d’une férue en économie et ma réaction était une réaction sociale, psychologique et ancrée dans ma foi.

 

Ce que je reproche à cette proposition de revenu universel, c’est la négation du besoin de tout être humain de travailler et non d’être assisté. Je ne nie pas la nécessité d’aider les démunis, mais pour moi la solution doit être positive. J’ai, chevillée au corps (et à l’esprit), la notion d’espérance et c’est pour cela que je veux espérer qu’il y aura encore du travail pour tous demain et après-demain. Je pense qu’il faut agir pour créer du travail. Mettre en place le revenu universel, c’est être défaitiste, sans espoir, sans croire que l’homme réussira à faire face. Je suis certes optimiste, c’est dans ma nature, mais il faut penser positivement.

 

Travailler, c’est être intégré socialement, c’est pouvoir dire « je travaille à… », c’est rencontrer d’autres hommes ou femmes, échanger idées et projets. On me répond que cela sera toujours possible grâce au bénévolat. Pour avoir pratiqué le bénévolat sous plusieurs formes et à tous âges, je pense qu’il ne remplacera jamais l’insertion que permet le travail.

 

Avec le revenu universel, aller travailler sera-t-il encore possible ? Qui fera l’effort de créer du travail ? Va-t-on baisser les bras face à une économie qui pense plus au profit de quelques-uns plutôt qu’au bien de beaucoup ? Certes, je suis à contre-courant.

 

Aussi, je situe là mon espérance : espérance en l’homme et sa créativité ; en la société et sa responsabilité. Oui, je suis utopiste, mais cela vient de ma foi.

 

Françoise Costil

 

bénévole à Emmaüs Lyon

 

 

 

 

 

 

 

 

© Costil

 

 

 

 

 

 

#Actualité #Diaconie #Dossiers #Grâce #Housing first #Interdépendance #Logement #Pauvreté #Solidarité #Spiritualité

Nos titres

Échanges
Ensemble
N°699 - novembre 2025
Le Cep
Le nouveau messager
N°446 - juin 2020
Le Protestant de l'Ouest
N°740 - novembre 2025
Le Ralliement
N°349 - novembre 2025
Liens protestants
N°209 - novembre 2025
Paroles protestantes Est-Montbéliard
N°500 - novembre 2025
Paroles protestantes Paris
Réveil

Pour aller plus loin

Violence dans l’église : Nommer, comprendre, éclairer, un état des lieux nécessaire
Violences sexuelles et sexistes : où en sont les protestants ?
Violence dans l’église : Nommer, comprendre, éclairer, un état des lieux nécessaire
Depuis quelques années, plusieurs affaires douloureuses ont secoué le protestantisme français et mis en lumière la difficulté de nos Églises à affronter la réalité des violences sexuelles et sexistes. Dans la continuité des rapports qui ont marqué la société et nos propres institutions, il est devenu indispensable de poser un regard lucide et pédagogique.
Écouter et réparer : La commission reconnaissance et réparation
Violences sexuelles et sexistes : où en sont les protestants ?
Écouter et réparer : La commission reconnaissance et réparation
La Commission Reconnaissance et Réparation (CRR) a été fondée en novembre 2021 à l’initiative de la Conférence des religieux et religieuses de France (Corref) de l’Église catholique. Son rôle est de reconnaître, en toute indépendance, les violences sexuelles commises par des religieux et de proposer des formes de réparation pour les victimes. Elle est présidée par Antoine Garapon, magistrat honoraire et ancien juge des enfants.
Édith Tartar-Goddet : Prévenir les abus, un travail de fond pour l’Église
Violences sexuelles et sexistes : où en sont les protestants ?
Édith Tartar-Goddet : Prévenir les abus, un travail de fond pour l’Église
Édith Tartar-Goddet a publié en 2020 un ouvrage sur la toute-puissance humaine et les abus de pouvoir dans les Églises. Elle attire l’attention sur la banalisation de certaines violences. Pour les victimes, c’est alors la double peine : à la souffrance succèdent l’indifférence et l’isolement.
Deux ans d’existence de la cellule VSS des EEUDF : l’heure du bilan
Violences sexuelles et sexistes : où en sont les protestants ?
Deux ans d’existence de la cellule VSS des EEUDF : l’heure du bilan
En octobre 2022, le conseil d’administration des Éclaireuses et Éclaireurs Unionistes de France (EEUdF) a adopté un texte concernant les violences sexistes et sexuelles (VSS). Par ce texte, l’association s’engage notamment à agir concrètement pour éduquer à des relations humaines harmonieuses et à l’égalité des genres, et pour lutter contre les VSS.
EPUdF : des outils pour lutter contre les violences
Violences sexuelles et sexistes : où en sont les protestants ?
EPUdF : des outils pour lutter contre les violences
Depuis quelques années l’Église protestante unie de France travaille la question des violences en Église.
Animal, on est mal
Dossiers
Animal, on est mal
Le droit français ne reconnaît les animaux comme « des êtres vivants doués de sensibilité » que depuis un an. Cela ne suffira pas pour que leur soient épargnées les souffrances, d’autant plus intolérables qu’elles sont évitables, infligées par l’élevage intensif, les conditions d’abattage et la recherche scientifique…
L’espérance malgré tout
Haïti, la rançon de l'indépendance
L’espérance malgré tout
Quand on regarde le niveau de misère auquel le peuple haïtien est soumis depuis des décennies, on comprend difficilement qu’en Haïti le taux de suicide ne soit pas de loin plus élevé que celui des autres pays des Caraïbes. C’est pourtant dans ce contexte qu’on trouve des hommes et des femmes de foi qui décident de continuer d’oeuvrer malgré la mauvaise foi de ceux qui installent, nourrissent et maintiennent la destruction de la vie en Haïti.
Agir pour tous les enfants
Haïti, la rançon de l'indépendance
Agir pour tous les enfants
Depuis 1986, la Fédération des écoles protestantes d’Haïti (FEPH) s’est fixé pour objectif de garantir une éducation de qualité accessible à tous les enfants. Alors que les gangs armés n’hésitent pas à enrôler des enfants, elle est plus que jamais indispensable à la jeunesse haïtienne.
Le prix de l’indépendance
Dossiers
Le prix de l’indépendance
200 ans après l’indépendance, le remboursement de la dette d’Haïti à la France est toujours au centre des discussions. Mais de quoi s’agit-il vraiment ?