C’est à travers les mots humains des écrits bibliques que Dieu se révèle et fait entendre sa Parole. C’est pourquoi les protestants reconnaissent à la Bible une autorité centrale.
Une diversité de témoignages
Elle n’est toutefois pas un texte dont le sens serait univoque, intemporel et qu’il n’y aurait plus qu’à répéter. De manière significative, on utilise souvent un pluriel, « les Écritures », pour désigner la Bible. Elle rassemble, en effet, des témoignages écrits à des époques et dans des contextes différents. Mais tous expriment la promesse de Dieu et sa présence au cœur d’existences singulières. Une polyphonie qui montre la capacité des auteurs bibliques à renouveler et diversifier les langages pour confesser Celui qui en est l’unité.
Celles et ceux qui lisent la Bible aujourd’hui sont dans une situation analogue. L’Église n’étant plus, pour le protestantisme, le dépositaire autorisé du sens des textes bibliques, chaque croyant ou communauté peut avoir accès à la Parole de Dieu. Ce qui signifie une diversité d’approches et de compréhensions des textes, en fonction de la situation sociale, culturelle, existentielle de chacun.
Des régulations nécessaires
Ce qui n’est pas sans soulever des questions. Ainsi la théologienne protestante Suzanne de Dietrich a pu dire : « La Bible nous unit tant que nous ne l’ouvrons pas. » Et Boileau moquait cette liberté d’interprétation en affirmant que « tout protestant est pape une Bible à la main » ! Le risque de faire dire à la Bible ce que l’on veut, de l’utiliser, voire de l’instrumentaliser, n’est ni infondé ni inexistant. C’est pourquoi Calvin rappellera à plusieurs reprises que « la Bible n’est pas un nez de cire que l’on peut tordre à sa guise ». On ne saurait donc oublier que pour éviter cette dérive, il existe, en protestantisme, des régulations. Elles accompagnent et encadrent la liberté d’interprétation, sans pour autant imposer une signification unique. C’est, d’abord, l’exigence d’une étude rigoureuse et critique des textes, préconisée par les réformateurs, en s’appuyant sur les outils et savoirs à disposition. C’est un des rôles des pasteurs d’accompagner le peuple de l’Église dans cette lecture documentée de la Bible. Une deuxième régulation réside dans le débat communautaire et l’interrogation mutuelle des diverses interprétations. La troisième régulation, c’est la référence aux textes de la tradition. Car le protestantisme, contrairement à une idée reçue, leur accorde aussi une autorité. En particulier, les déclarations de foi des Églises. Elles constituent une clé de lecture et un cadre théologique pour l’interprétation des textes bibliques. Enfin, le protestantisme insiste sur le rôle de l’Esprit de Dieu et sur la prière pour éclairer le croyant dans sa lecture de la Bible.
Un défi aux fondamentalismes
En mettant au cœur de sa foi un texte pluriel, les Écritures bibliques, livré au débat des interprétations, le protestantisme interroge la difficulté des religions et de la société à faire vivre la diversité. Son rapport spécifique au texte est un défi à tous les fondamentalismes – c’est-à-dire, quand on identifie la Parole de Dieu avec la lettre du texte, l’imposant alors comme une vérité absolue. On ne dira jamais assez, dans les dialogues interreligieux notamment, que le protestantisme n’est pas une religion du Livre, mais ce sont des Églises de la Parole vive.

Chaque croyant ou communauté peut avoir accès à la Parole de Dieu
