En effet, des sondages montrent que bon nombre de nouveaux venus dans le protestantisme ont fait ce choix après avoir entendu des prédications qui les avaient touchés ; à l’occasion d’obsèques, de bénédictions de mariage ou simplement de passage lors d’un culte dominical.
Partir des Écritures
Le fait même que l’on prêche est d’abord le signe manifeste que la Parole vivante de Dieu ne saurait être identifiée aux Écritures bibliques dans leur littéralité. Il faut que des mots humains, avec l’aide du Saint-Esprit la fassent advenir, ici et maintenant.
Pour cela, aimait à dire le pasteur Louis Simon, la prédication requiert de « partir des Écritures ». Dans les deux sens de ce verbe. Partir au sens de s’y enraciner. Car c’est à travers elles que Dieu se rencontre et se révèle. Mais aussi partir, au sens de s’éloigner, de la lettre du texte et de son contexte, afin de rejoindre chacun·e au plus intime de son existence. Karl Barth disait que la prédication c’est « quand la ligne de la Bible coupe la ligne de la vie humaine ».
Éviter les malentendus
La prédication ne doit pas être confondue avec bien des discours religieux. En effet, elle ne délivre pas un savoir sur Dieu, mais elle livre à sa Parole. Une Parole existentielle qui rejoint de manière personnelle quiconque l’écoute. Une Parole « pour moi », « pour nous » aimait à dire Luther.
Au risque d’être mal entendue, la prédication ne saurait être ni une conférence, fût-elle théologique, ni une étude biblique, encore moins une paraphrase du texte. Ce n’est pas davantage une leçon de morale prescriptive, ni une tribune permettant à la personne qui prêche, d’exposer ses opinions sur l’actualité ou ses états d’âme personnels. Et si les outils de la communication ou de la rhétorique sont utiles, l’objectif n’est pas d’être brillant sur le plan oratoire. Car c’est la Parole seule qui doit briller, au cœur du quotidien de celles et ceux qui l’entendent. Afin de les appeler à la foi ou de la fortifier. Car « la foi vient de ce qu’on entend, et ce qu’on entend vient de la parole du Christ » (Romains 10.17).
Le Christ présent
S’il n’est pas toujours facile de définir la prédication, on peut en dire clairement la visée ultime pour les Réformateurs. « Prêcher l’Évangile, écrit Luther, n’est rien d’autre que le Christ qui vient à nous, ou nous qui sommes amenés au Christ. » Prêcher c’est donc rendre présent le Christ, « la Parole faite chair » (Jean 1.14). En lui la Parole de Dieu est venue habiter les langages humains. Ceux de la prédication, malgré leurs limites, éclairés par l’Esprit, peuvent susciter, pour la personne qui les écoute, l’événement d’une rencontre et d’une relation avec Dieu.
C’est dire que la prédication ne se réduit pas au sermon du dimanche matin. C’est également chaque fois que, par sa parole, un·e pasteur·e, un·e prédicateur·tr·ice, un témoin rend Dieu présent au cœur d’une vie. À l’image de Jean-Baptiste, du retable d’Issenheim, qui de son doigt désigne le Christ.
C’est pourquoi la prédication, constitue l’une des richesses spécifiques que les Églises protestantes peuvent offrir aujourd’hui dans le domaine de la spiritualité. Se tenant toujours à la croisée d’une double écoute, celle des paroles humaines et celle de la Parole de Dieu.
