Nombres 6.22-27 : Soyez triplement bénis

« Le Seigneur dit à Moïse : Parle à Aaron et à ses fils, et dis-leur : Voici comment vous bénirez les enfants d’Israël. Vous leur direz : Que le Seigneur te bénisse et te garde ! Que le Seigneur fasse briller sa face sur toi et t’accorde sa grâce ! Que le Seigneur tourne vers toi son visage et te donne la paix ! C’est ainsi qu’ils mettront mon nom sur les enfants d’Israël, et moi, je les bénirai. » 

Après la pause estivale, alors que beaucoup ont profité d’un temps de repos pour se ressourcer, voici que s’ouvre une nouvelle période d’activités. Dans nos Églises, nos engagements, nos familles et nos communautés, une nouvelle étape commence. Elle s’ouvre souvent avec un mélange d’enthousiasme et d’incertitudes. Dans ce contexte, le besoin d’un repère solide, d’un appui spirituel fiable, se fait particulièrement sentir. 

 

Le texte de Nombres 6.22-27 tombe à point nommé pour accompagner cette reprise. Il ne s’agit pas simplement d’une parole liturgique ancienne, mais d’une bénédiction que Dieu lui-même transmet à Moïse, pour qu’elle soit relayée à travers les prêtres à son peuple. Une parole précieuse, qui traverse les siècles et continue d’être proclamée aujourd’hui dans les cultes, lors des envois, des fins de célébration, des moments solennels. 

 

Ce texte est une bénédiction en trois temps, composée de formules courtes, mais puissantes. Elle est structurée de façon poétique et progressive : elle exprime la sollicitude divine dans toutes ses dimensions – matérielle, relationnelle et spirituelle.

 

 

  1. « Que le Seigneur te bénisse et te garde ! »

 

La bénédiction commence par une double demande?: la bénédiction et la garde. Le verbe hébreu traduit par « garder » signifie aussi « protéger, veiller, préserver ». Ce que nous recevons ici n’est pas d’abord une réussite visible ou une accumulation de biens, mais une présence vigilante, un soin divin au quotidien. Dieu n’est pas un spectateur distant : il est le gardien fidèle de son peuple, celui qui veille avec amour. 

 

Ce verbe apparaît aussi dans le récit de la Création, lorsque Dieu place l’être humain dans le jardin d’Éden « pour le cultiver et le garder » (Genèse 2.15). Il y a là un écho : comme Dieu garde son peuple, il nous confie aussi une mission de veille, d’entretien, de protection, vis-à-vis de ce qui nous est confié. La bénédiction reçue devient bénédiction transmise.  

 

  1. « Que le Seigneur fasse briller sa face sur toi et t’accorde sa grâce ! »

 

Dans cette deuxième formule, il est question du visage de Dieu qui « brille » ou « rayonne ». Le verbe hébreu peut être traduit par « éclairer, illuminer, faire rayonner ». Dieu ne se contente pas de garder son peuple de loin : il tourne vers lui une face lumineuse, un regard bienveillant. Il ne cache pas sa présence, il l’illumine. 

 

C’est une image forte : dans la Bible, voir la face de Dieu est le signe d’une proximité extrême, d’une communion. Moïse lui-même rayonnait après avoir parlé avec Dieu (Exode 34.29). Le croyant, à son tour, peut refléter cette lumière divine – non pas comme une démonstration de supériorité, mais comme le signe discret d’une vie habitée par la grâce. 

 

Et cette lumière est indissociable de la grâce : Dieu « fait grâce », il est bienveillant, il pardonne, il donne sans mérite. La grâce, dans la Bible, est ce geste d’amour souverain et gratuit. Au moment où l’année redémarre, n’avons-nous pas besoin d’une telle lumière, pour nous-mêmes et pour ceux que nous accompagnons ? D’un visage lumineux dans un monde parfois sombre ? 

 

  1. « Que le Seigneur tourne vers toi son visage et te donne la paix ! »

 

La troisième formule vient comme un couronnement. Le Seigneur tourne son visage vers son peuple, il ne détourne pas les yeux. Il regarde avec faveur, avec attention. Le verbe peut aussi signifier « soulever, porter, regarder avec bienveillance ». 

 

Et le fruit de ce regard, c’est la paix. En hébreu, le mot « shalom » ne désigne pas simplement l’absence de conflit, mais une paix profonde, globale : harmonie, intégrité, santé, bien-être. C’est cette paix-là que Dieu offre à son peuple, au cœur même des chemins incertains. 

 

Ce texte prend toute sa profondeur quand on se souvient du contexte : Israël est sur le point de quitter le Sinaï pour entrer dans une période de marche longue et périlleuse vers la Terre promise. L’avenir est flou, les embûches nombreuses. Et pourtant, Dieu commence par bénir. 

 

Nous aussi, nous avons besoin de cette parole bénissante pour reprendre notre marche. Dans notre mission, nos engagements, nos projets, nous pouvons nous sentir armés, préparés, organisés. Mais rien ne remplace l’assurance de la présence de Dieu qui veille, illumine et donne sa paix. Il met son nom sur nous – c’est-à-dire qu’il affirme sa relation, son alliance, son identité partagée avec son peuple. 

 

Dans la tradition biblique, bénir n’est pas une formule magique : c’est une parole qui engage. Celui qui bénit appelle la présence de Dieu sur une vie, et le peuple qui reçoit la bénédiction est invité à vivre en cohérence avec elle. 

 

En ce début d’année pastorale, redisons cette bénédiction comme une parole de vie. Redisons-la pour nous-mêmes, pour nos enfants, nos frères et sœurs dans la foi. Que ce ne soit pas seulement une parole de fin de culte, mais un élan pour toute notre vie. 

 

« Allons dans la paix du Christ. Que le Seigneur nous bénisse et nous garde ! 

 

Qu’il fasse briller sur nous son visage et nous accorde sa grâce ! 

 

Qu’il tourne vers nous son regard et nous donne la paix ! »  

 

Amen. 

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